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FONDATION JÉRÔME SEYDOUX-PATHÉ

Cycle

Danser au cinéma

Du  12/06/24  au  13/07/24 


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La danse est l’art de l’espace et du temps, le cinéma s’en inspire, perméable dès ses débuts à toutes les formes d’art. Il démocratise les danses de ballet en filmant des numéros exécutés par les plus grands danseurs et danseuses de l’époque, dévoile la diversité des danses du monde, fait écho aux danses populaires telles que la danse apache ou le charleston, et accompagne l’apparition de la danse moderne. Loïe Fuller, actrice, danseuse, égérie de la Belle Époque, jette les bases de cette modernité en créant une danse qui s’apparente à un effet kaléidoscopique fascinant, composé de mouvement, de lumière et de couleur. Cette danse serpentine, dont le cinéma saisit immédiatement l’attrait et la beauté, maintes fois imitée et même parodiée (par le remarquable Little Tich), marque autant l’histoire de la danse que du cinéma, preuve en est le documentaire Obsessed with Light que lui consacre aujourd’hui les deux réalisatrices Zeva Oelbaum et Sabine Krayenbühl.


La danse fascine les artistes de l’Avant-garde (et du cinéma expérimental). Si la cinéaste Germaine Dulac conçoit le cinéma comme un art visuel autant qu’un art du temps, elle évoque et met naturellement en scène la danse, ses gestes, rythmes et mouvements dans son œuvre cinématographique. Thèmes et variations (1928) évoque des rythmes harmonieux et fluides, Danses espagnoles (1928) et La Fête espagnole (1920) entraînent le spectateur dans un tourbillon de danse ibérique et de folie. En 1924, René Clair présente Entr’acte au sein du ballet dadaïste Relâche de Francis Picabia. Le film met en scène une danseuse barbue, un chasseur tyrolien interprété par Jean Börlin, le chorégraphe des innovants et ludiques Ballets suédois, Marcel Duchamp et Man Ray en joueurs d’échecs, et le duo Picabia-Erik Satie au canon. Vénéré par l’Avant-garde et ami du danseur russe Vatslav Nijinsky, Charlie Chaplin rend hommage à son ballet L’Après-midi d’un faune dans Sunnyside en 1919.



Le cinéma fait souvent appel à des danseuses professionnelles qui poursuivront, pour certaines, une carrière cinématographique. C’est le cas de la Suédoise Jenny Hasselquist, danseuse étoile du Ballet royal, que Mauritz Stiller engage pour son premier rôle au cinéma dans Balett primadonnan (1916) aux côtés de Lars Hanson. Dans la fiction, le destin des danseuses prend souvent un tournant dramatique. Jenny Hasselquist incarne un personnage tiraillé entre l'amour et la gloire, tout comme la délicate Maria Orska dans le film allemand Die schwarze Loo de Max Mack (1917). Tänzerin Töd de Siegfried Philippi (1919) est un film au récit tortueux qui évoque la répétition et la malédiction d’une danse macabre. Quant à l’actrice et danseuse et Étoile de l'Opéra-Comique Stacia Napierkowska, elle apparaît à la fois en Carmen dans Le Charme des fleurs de Gaston Velle (1910) et en danseuse grisée par le succès dans L'Etoile du génie de Ferdinand Zecca et René Leprince (1914). Jacques de Baroncelli tombe sous le charme d'une jeune danseuse espagnole de 17 ans, Conchita Montenegro,et lui offre un premier rôle en France dans La Femme et le pantin (1929). Le réalisateur danois Holger-Madsen passe du drame à la comédie sur un même canevas, de Ballettens datter (1913) avec la danseuse Rita Sacchetto à Was ist los mit Nanette? (1928) interprété et produit par l’actrice Ruth Weyher : une danseuse renonce à son art à la demande de son époux mais ne peut s’empêcher d’y revenir, par passion ou nécessité. L’actrice Alla Nazimova, formée à la danse dans sa jeunesse en Russie puis devenue star hollywoodienne, sublime la danse des sept voiles dans l’adaptation de la pièce d’Oscar Wilde, Salomé. Réalisé en 1923 par Charles Bryant mais produit et entièrement façonné par Nazimova, ce film d’avant-garde, formellement subjuguant, s’inspire des illustrations d’Aubrey Beardsley pour la conception des décors et des costumes dans un style Art Nouveau. Hélas, ce film s’avère être l’échec retentissant qui mettra fin à sa carrière. L’actrice danoise Asta Nielsen se voit, elle, propulsée star internationale grâce à une danse érotique jugée scandaleuse dans le drame Afgrunden d’Urban Gad (1910). Pola Negri, d'abord danseuse au Ballet impérial de Varsovie, s’en inspire peut-être quelques années plus tard pour son interprétation dans Bestia (1917), film polonais réalisé par Alexander Hertz avant la carrière internationale de l’actrice. Le film ressort opportunément en 1921 aux États-Unis sous le titre The Polish Dancer.



Impossible de ne pas évoquer le Moulin-Rouge et ses spectacles grandioses dans La Revue des revues de Joe Francis et Alex Nalpas (1927) où l’on peut admirer les plus célèbres danseuses telle que Joséphine Baker, et dans le fascinant Moulin Rouge d’Ewald-André Dupont (1928). Autre film britannique, signé Alfred Hitchcock, The Pleasure Garden (1925) confronte le destin de deux danseuses et leurs visions divergentes de la gloire et de l’amour, un film délicieusement drôle et noir. L’immense succès du charleston est foisonnant et donne lieu à de nombreux hommages, de Charley Bowers préparant un concours, au couple Jean Renoir-Catherine Hessling à la rencontre de l’artiste et danseur américain Johnny Hudgins. Mae Murray, danseuse aux Ziegfeld Follies de Broadway avant le cinéma, incarne en 1924 une version moderne de Circé, et offre dans ce film des scènes de danse endiablées, excessives et emblématiques, tout à son image.


La danse s’est naturellement et parfaitement intégrée au récit cinématographique, bien que le geste dansé apparaisse sous des formes diverses : performances, tableaux chorégraphiques, attractions, parodies, rêves, scènes comiques, moments d’érotisme, recherche avant-gardiste. Comme l’écrit Nicole Brenez : « … la danse joue un rôle structurant, précisément parce qu’elle est indue, déplacée, déplaçante : elle est la conductibilité même. » (De la figure en général et du corps en particulier. L'invention figurative au cinéma. Ed. De Boeck Supérieur, 1998)



Ce cycle est ponctué d’évènements inédits, à commencer par une rencontre entre Elisabeth Platel, directrice de l’école de danse de l’Opéra national de Paris, et le pianiste compositeur Jean-François Zygel sur le thème de la musique, de la danse et du cinéma. Marion Carrot présente son passionnant ouvrage Danser dans les films muets, une expérience moderne (Ed. PUR-cinéma, 2023) lors d’une séance-signature et la présentation du film Paris Girls d’Henry Roussell (1929). En plus des accompagnements par les pianistes issus de la classe d’improvisation de Jean-François Zygel, le cycle propose quatre ciné-concerts exceptionnels. Circé est accompagné par un trio de jazz, Kolia Chabanier au piano, Émile Parisien au saxophone et Ariel Tessier aux percussions. La toute nouvelle restauration de L’Etoile du génie par la Fondation Pathé est accompagnée par Demian Martin au piano et Maya Devane au violoncelle. Le programme de cinéma expérimental intitulé Danse affranchie, présenté par Sébastien Ronceray, est accompagné par Aidje Tafial à la batterie et ordinateur. Enfin, le film Salomé est accompagné par Émile Sornin au piano et aux synthétiseurs, Arnaud Seche à la flute traversière et Maxime Daoud à la guitare et aux synthétiseurs, à l’occasion d’une création coproduite par le Festival La Rochelle Cinéma, la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé, BulCiné (Nantes) et l'association Ciné Ma Passion (Pau).


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