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Séance

SÉANCE-SIGNATURE "Blackmail", Alfred Hitchcock, 1929, (1h15)


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SÉANCE-SIGNATURE : "Blackmail", Alfred Hitchcock, 1929, (1h15)

La séance est présentée par Jean-Loup Bourget


Premier film parlant de Hitchcock, Blackmail (Chantage, 1929) est aussi son dernier film muet. Le film fut en effet tourné, puis distribué, en deux versions. Pour l’essentiel, la version muette fut tournée d’abord, de nouvelles séquences parlantes étant filmées ensuite. Mais il est clair que Hitchcock avait d’emblée envisagé l’éventualité d’une version parlante et avait filmé certaines scènes en se ménageant la possibilité d’y ajouter des dialogues, et les deux versions distribuées sont le résultat d’un montage, voire d’un bricolage, complexe, combinant des séquences venues des deux tournages successifs, comme l’a montré Charles Barr dans sa comparaison minutieuse des deux versions (English Hitchcock, 1999, p. 81-97). La version parlante fut distribuée à Londres tandis que la version muette était exploitée dans les salles de province, pas encore équipés pour projeter des films sonores.

           La version parlante offre une curiosité. Le personnage principal d’Alice White y est incarné par Anny Ondra, actrice d’origine tchèque, vedette du film précédent de Hitchcock, The Manxman, et « la meilleure interprète des films muets de Hitchcock » selon Charles Barr. En raison de son accent, elle est doublée par l’actrice anglaise Joan Barry, qui sera la vedette de Rich and Strange (1931) ; ce doublage a été effectué « en direct », pendant le tournage, la technique de postsynchronisation étant encore balbutiante.

           Sous sa forme hybride et expérimentale, Blackmail permet de nuancer plusieurs idées reçues sur Hitchcock. D’abord, si le cinéaste avait parfaitement maîtrisé le « langage visuel » du cinéma muet, il n’éprouvait pour le muet aucune nostalgie et a accueilli le parlant comme l’occasion de nouveaux défis techniques et esthétiques à relever. En deuxième lieu, Blackmail atteste le rapport étroit et complexe de Hitchcock au théâtre : adaptant ici une pièce de Charles Bennett, qui deviendra son scénariste attitré de 1934 à 1937, il « aère » la pièce en l’ouvrant sur des extérieurs réels ou recomposés, alors que dans d’autres circonstances il s’attachera au contraire à souligner la théâtralité du matériau d’origine (par exemple dans Juno and the Paycock, Rope ou Dial « M » for Murder). Il faut nuancer aussi le poncif de la médiocrité supposée du cinéma anglais de l’époque. Blackmail est le premier long métrage entièrement parlant tourné en Angleterre, et au moins sur le plan technique, les studios d’Elstree, équipés en sonore, étaient en avance sur ceux du continent, et accueillirent tant les producteurs français que le cinéaste allemand Pabst, qui souhaitait s’initier à la nouvelle technique.

           Enfin Blackmail, avec Murder ! et bien d’autres titres, confirme l’intérêt qu’il y a à découvrir ou redécouvrir l’œuvre anglaise de Hitchcock (22 films de 1926 à 1939, sans compter au moins deux films de la période hollywoodienne, Under Capricorn et Frenzy), qui reste méconnue et sous-estimée par la critique française.

Jean-Loup Bourget


La séance est suivie de la signature de son ouvrage Sir Alfred Hitchcock, cinéaste anglais, Classiques Garnier, 2021.


Toutes les séances sont accompagnées par les pianistes issus de la classe d'improvisation de Jean-François Zygel (CNSMDP).


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