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FONDATION JÉRÔME SEYDOUX-PATHÉ

Préface et sources d'Henri Bousquet (1912-1914)


Ce volume répertorie les années 1912, 1913 et 1914 soit plus de 2000 titres. Pour ces trois années, comme pour les deux premiers volumes, j'ai suivi les indications de dates portées sur les registres Pathé. Cependant, dès la fin de 1913 et en 1914, ces indications deviennent fragmentaires. J'ai suivi dès lors, d'abord la numérotation des Bulletins, qui recoupait les programmes hebdomadaires puis, pour 1914, l'indication du numéro de programme porté en marge du deuxième registre lui aussi conservé aux Archives Pathé. Ce dernier, donne, outre les mêmes indications que le registre précédent une date d'édition qui se trouve être approximativement antérieure de trois mois à la sortie des programmes. Avec ce changement de registre intervient également un changement dans les mots du code télégraphique. En effet, et curieusement, la langue italienne remplace le français Si les années 1912 et 1913 ont été relativement simples à inventorier, il n'en a pas été de même pour l'année 1914 par suite, évidemment, de la déclaration de guerre le 2 août 1914. En 1912, tous les sujets, à l'exception de cinq, proviennent des scénarios déposés dans le cadre du Dépôt Légal et conservés soit à la Bibliothèque de l'Arsenal (Département des Arts du Spectacle de la Bibliothèque Nationale) à Paris, soit au Service des Archives du Film (Centre National du Cinéma) à Bois d'Arcy. La majorité d'entre eux se retrouvent d'ailleurs dans les• Bulletins Hebdomadaires Pathé Frères conservés à la Bibliothèque de l'Arsenal (fond Rondel) et à l'antenne de Versailles de la Bibliothèque Nationale En 1913, les scénarios avec photogrammes sont très fragmentaires. Les Bulletins qui changent de couverture et de titre sont eux aussi incomplets tant à la Bibliothèque de l'Arsenal qu'à Versailles. Grâce à M. Laurent Mannoni qui a bien voulu me laisser compulser sa collection personnelle pour les années 1913 et 1914, j'ai eu à ma disposition tous les numéros des Bulletins sauf en 1913 les numéros 1 à 3 inclus, ce qui m'a permis, à l'exception de huit films, de reconstituer la production de cette année là. L'inventaire pour 1914 fut plus difficile.. Les Bulletins s'arrêtent en effet au n024, correspondant approximativement à la fin juin. Les scénarios avec photogrammes sont encore plus fragmentaires pour cette année là. J'ai eu alors recours essentiellement à deux autres sources importantes. La première est constituée par les scénarios dits "conformes à la vue" conservés à la Bibliothèque de l'Arsenal et qui indiquent parfois, outre un synopsis détaillé, des indications de mise en scène, des descriptions de décors, des noms d'interprètes, de réalisateurs ou de scénaristes. Cette source est indiquée par la mention : "Sujet dans Scénario Arsenal' La deuxième source est constituée par les Bulletins que Pathé éditait à Londres : le Pathé Journal Cinema (4 octobre 1913 - 30 juillet 1914) qui devient le Pathé Weekly Bulletin (20 août 1914 - 28 janvier 1915). Cette source est indiquée par la mention "Sujet dans P.CJ. ou P.W.B.". Une troisième source importante fut le recueil des programmes des Cinémas Pathé en Belgique conservés à la Cinémathèque Royale de Belgique. Ces programmes m'ont ainsi fourni nombre de génériques et en particulier les interprétations des Misérables et de La Fièvre de l'or. Une lecture attentive de la rubrique "Nouveautés intéressantes" et des programmes des cinémas de province dans le bihebdomadaire Le Cinéma et l'Écho du cinéma réunis m'a permis non seulement de localiser quelques sujets mais aussi d'indiquer ou de compléter des génériques. Bon nombre de noms d'interprètes et scénaristes m'ont été fournis grâce à cette source. Les revues anglaises, The Bioscope et le Kinematograph Monthly Film Record m'ont été aussi d'un grand secours. J'ai pu également, visionner quelques copies conservées à la Cinémathèque Française.

Dans ma préface du volume 1910-1911, je revenais à nouveau sur les bandes produites par les diverses "marques" qui apparaissent dans les Bulletins et qui faisait suite à mon article "Un Empire Commercial" paru dans mon volume 1907-1908-1909; j'indiquais que des marques comme Les Films Constantin Philipsen Copenhague et Hepwix me sem¬blaient être "de purs produits Pathé". TI n'en était rien. Dans ce domaine, très flou à la vérité, il me semble utile d'apporter sinon des précisions, du moins quelques indications. Dans le présent volume pas moins de 26 firmes nouvelles font leur apparition. J'ai, comme pour la Thanhouser Company conservé pour cinq d'entre elles uniquement le titre. Il s'agit donc de Constantin Philipsen, Hepwix, Phoenix Lucarelli, Svenska Biografteatern et British Biograph. En ce qui concerne la firme danoise, je me suis basé sur l’article de Madame Marguerite Engbert "Le Societa di produzione minori in Danimarca" paru dans le volume "Schiave bianche allo spechio" à l'occasion de la rétrospective sur le cinéma scandinave lors des Giornate deI Cinema muto en 1986.Quant à la Hepwix c'est bien la marque de fabrique de la Hepworth and Company. Par contre, et avec beaucoup de prudence, je donne dans ce volume toutes les bandes produites par 1es autres "marques" Si Tony Fletcher (cf Griffithiana n° 50) mentionne Britannia Film et Big-Ben Films comme des "Pathé subsidiary", R. Low et R. Manvell ne conservent que la Big-Ben. En Suède, la Swedish Film est indiquée par Alexander Lars dans "Svensk Filmografi" comme étant une " Produktion Pathé Frères filial" et il indique comme producteur Siegmund Popert l'ex commis voyageur dont Charles Pathé cite le nom dans son livre de souvenirs "De Pathé Frères à Pathé Cinéma". La marque Swedish Films a d' ailleurs été déposée par le cabinet Danzer au Tribunal de Commerce de Paris le 11 décembre 1912. Parmi ces 26 marques nouvelle, douze ne feront qu'une courte apparition dans les programmes. Ainsi en est-il de International Sporting Film, Brazileira Film, Alfredo Robert, Selecta Films dirigée par Edmond Floury, ancien opérateur Pathé, Velle Films, Hilar Film, Andréani Film, Film Hansen-Moscou, Austria Films, Météor Films, Les Grands Films Sensationnels et Colosseo Films. Par contre, deux firmes Milanese Film et Oriental Films ont eu une production un peu plus importante. Dans le Courder Cinématographique (n° 48 du 22 novembre 1912) paraissait la notule suivante : "Une nouvelle marque. Le jeune Abélard ... fera éditer désormais ses films par la Cosmopolitan Films, 10, rue Laffitte, Paris" Ce premier film Bébé n'aime pas sa concierge est inscrit au Catalogue en novembre. Cependant, la nouvelle firme va bientôt changer de nom et s'appellera désormais Éclectic Films. La marque est déposée le 28 décembre 1912 par Ferdinand Wolf, déjà propriétaire des Grands Films sensationnels dont l'original de la feuille de dépôt se trouve dans les Archives Pathé.La marque de fabrique de Éclectic est un triangle qui mentionne à sa base Paris-New York. Un universitaire américain Martin F. Norden dans un remarquable article: "Pathé Frères à l'époque du Trust" paru dans "Pathé, Premier Empire du Cinéma" a fort bien disséqué les tenants et aboutissants de cette firme dont les liens avec Pathé Frères, écrit M. Norden, sont rendus publics lors de la sortie. aux États Unis du célèbre sérial The Perils of Pauline en mars 1914. M. Norden quelques lignes plus loin, ajoute "À la mi-janvier 1915, Pathé cesse ses cachotteries et annonce qu'Éclec!ic est devenue Pathé Exchange, Inc., une filiale autonome mais totalement contrôlée par Pathé Frères. Ce qu'elle était déjà, sans aucun doute, sous l'étiquette Éclectic". J'ai donc intégré dans ce volume, après quelques hésitations cependant, les films produits par Éclectic. Le 1'" septembre 1913, l'agence Ernest Hébert s'installe au 14, rue Favart qui fut, après le 98, rue Richelieu le siège social de Pathé Frères avant son transfert 30, boulevard des Italiens. Hérbert annonce qu'il est l'agent exclusif des marques Eclectic, Hilar Film, Literaria Film, Instructif Film et Tanagra. Une notule parue dans le Courrier Cinématographique (n° 17 du 26 avril 1913) nous renseigne sur ce M. Hébert: "E. Hébert, attaché au service commerciale de Pathé Frères est promu officier d'académie" ce qui, à mon sens, ne laisse pas place au doute. Parmi les cinq marques distribuées par l'agence Hébert, hormis Eclectic, la plus importante est la Literaria Films implantée en Allemagne. Cette implantation ne date certes pas de ce moment. Mais diverses notes parues dans le Courrier Cinématographique mettent bien l'accent sur la politique de Pathé Fréres en Allemagne : le 29 novembre 1912 "Pathé Fréres a établi une succursale à Dusseldorf. Elle y bâtira une fabrique de films", le 13 décembre 1912 "La maison Duskes GMBH à Berlin s'est alliée avec Pathé Frères contre la Convention" et enfin, le 20 décembre 1912 "Pathé construit une fabrique de films à Tempelhoff". S'il fallait une preuve de plus pour admettre que la Literaria Films était bien une marque affiliée à Pathé en dehors des dires de Charles Pathé lui-même" ... nous liquidâmes ou fîmes liquider la société Literaria de Berlin…", une série de textes d'archives que M. Herbert Birrett, auteur d'un ouvrage remarquable sur la sortie des films en Allemagne, eut la gentillesse de me faire parvenir confirment cette assertion. Une petite phrase dans ces textes est, là encore, hautement révélatrice: "Pathé a envoyé Hébert à Milan (septembre 1914) pour exercer de l'influence sur la maison de Berlin".Enfin, il reste le cas de quatre acteurs comiques de la firme : André Deed, Max Linder, Prince dit Rigadin et Louis Boucot. Au vu des tableaux donnés dans les premières pages du Bulletin Pathé dès 1912, il est exact que le nom de ces artistes apparait dans la colonne Production mais leur nom disparaît en cours de Bulletin lorsque le scénario y est décrit et où le nom de la marque apparaît toujours en haut de la page. Je n'ai donc pas indiqué au cours de l’ouvrage pour les films de ces quatre interprètes s'ils en étaient les producteurs. Pour Charles Petitdemange, l'acteur a bien déposé sa marque Rigadin le 15 mai 1913. Pour Max Linder, il n'y a aucune trace de dépôt de "marque" mais dans le Courier Cinématographique (n° 30 du 20 juillet 1912) paraissait la note suivante: "La Rançon de la Gloire. On dit que Pathé Frères vient de s'attacher Max Linder pour trois années. On parle de chiffres fantastiques, invraisemblables. Ils atteindraient pour 3 ans de triomphal esclavage la valeur de un million" ce qui jette une curieuse lueur sur les rapports de l’acteur avec la "Grande Maison". Lors de l'Exposition "Pathé, Premier Empire du Cinéma" au Centre Georges Pompidou'; était exposé le contrat entre Louis Boucot et Pathé, contrat qui allait du 1'" janvier 1912 au 31 janvier 1914 et qui indiquait: "M. Boucot devra produire annuellement un minimum de dix négatifs qu'il pourra porter à 24 avec une moyenne de 3 au maximum par mois avec un métrage moyen de 130 à 150 mètres". Voilà qui est clair. n semble, quoique à ma connaissance, un tel contrat ne soit pas connu, qu'il en fut probablement de même avec André Deed. En effet, les journaux corporatifs annonçaient le départ le 15 décembre 1912 de André Deed et Valentina Frascaroli pour une longue tournée en Espagne, Portugal et Amérique du Sud. Le Courrier Cinématographique donnait même le 8 mars 1913 la composition de la troupe que le célèbre comique emmenait avec lui : "Jules Vma, Tristan Le Roux, Chapais, Mmes Signorini et Leroux. Opérateur: Fournier". Le 30 août 1913 André Deed et sa troupe étaient de retour en France. TI ramenait "une ample mois¬sons de documents" et le Courrier Cinématographique dans un article signé Nado d'ajouter: "A Paris, André Deed s'est empressé de reconstituer son personnel artistique pour faire face aux commandes de plus en plus importantes de la maison Pathé ... il va créer une nouvelle bande mise en scène sous sa' direction mais il n'y figurera pas". Un autre point d'interrogation subsiste également dans ce troisième volume. En effet, il existe 110 scénarios portant la numérotation 9000 et datés de 1912 et 1913 parmi les milliers déposés à la Bibliothèque Nationale. Quatre d'entre eux seulement, les numéros 9010, 9021, 9025 et 9031 apparaissent dans les Bulletins. Ds sont tous les quatre des productions de la S.C.A.G.L. Je n'ai jamais rencontré aucun des 106 autres titres ni dans les bulletins ni dans les sorties en France. lis ont pourtant bien existé puisque trois films d'Alfred Machin y figurent: La Trahison de l'abandonnée sorti à Londres sous le titre de The Interloper, L'Évasion de Hugo Van Groot sorti également à Londres et enfin Le Noël du moussaillon. On trouve d'autre part parmi cette centaine un film allemand de la Duskes Film, un film italien de la Milanese Film, cinq films russes, 7 films de la Britannia Film, 25 films Pathé Frères, 27 films de la Chicago Film dont un conservé à la Cinémathèque Française et 33 films de la Thanhouser Company! Tous ces scénarios portent l'indication "Programme complémentaire na ... " Étaient-ils destinés à une sortie en France ou Pathé Frères a-t-il voulu en les déposant se protéger de toute contrefaçon ou d'une sortie par une compagnie concurrente? Le mystère n'est pas éclairci, pour le moment.

Je voudrais, pour terminer, ajouter quelques précisions: 1 - Tous les renseignements sur les films tournés par Francesca Bertini au Film d'Arte Italiana sont tirés de l'ouvrage de Aldo Bernardini et Vittorio Martinelli Francesca Bertini 1892-1985. J'ai également utilisé outre l'ouvrage monu¬mental d'Aldo Bemardini Archivio dei Cinema ltaliano - volume 1 - Il Cinema' muto, les trois numéros de la revue Bianco e Nera inventoriant les années 1913 et 1914 du Cinéma muet italien de Aldo Bemardini et Vittorio Martinelli. 2 - Grâce à Mme Neïa Zorkaia, historienne et auteur de l' article sur "Le temps des Frères Pathé à Moscou" paru dans Pathé, Premier Empire du Cinéma, j'ai pu donner ou compléter nombre de génériques des films tournés en Russie. 3 - Un certain nombre de réalisateurs, scénaristes et interprètes des films tournés en Allemagne par la Duslœs Film ou la Literaria Film m'ont été fournis par la lecture de la Deutsche Stummfilme de Gerhard Lamprecht, dont les dix volumes sont conservés à la Bibliothèque de la Cinémathèque Royale de Belgique. 4 - L'identification de quelques films suédois de la Swedish Film a été rendue possible grâce à la Svensk Filmografi de Alexander Lars dont M. Jan Olson professeur à l'Université de Stockholm a eu l'amabilité de m'envoyer des extraits. 5 - Tous les renseignements sur Camille de Morlhon et ses films m'ont été, aimablement communiqués par Éric Le Roy, auteur d'une thèse de Doctorat sur ce metteur en scène. 6 - Un grand nombre de renseignements sur des réalisateurs, scénaristes et interprètes m'ont été fournis par le Catalogue 1908-1918 de MM. Raymond Chirat et Éric Le Roy dont ils ont bien voulu me communiquer une copie. 7 - Le nom de Theo Bouwmeester alias Theo Frenkel metteur en scène de quatre films de la Britannia Film m'a été aimablement communiqué par M. Geoffrey N. Donaldson de Rotterdam. 8 - Le nom de Oliver G. PiIœ réalisateur anglais de films sur les oiseaux apparaît dans les Bulletins Pathé publiés en Angleterre. Par ailleurs, Oliver G. Pike écrit dans la préface de son ouvrage Nature and my ciné caméra (cf. bibliographie) : "The largest and most important firm dealing with ciné film in those early days was Pathé Frères. They approa¬ched me, and for the ten following years l produced for them one or more nature film each year." Enfin, malgré toutes les relectures et vérifications, un certain nombre d'erreurs se sont sans aucun doute glissées dans ce catalogue. Je saurais gré, aux lecteurs de m'en faire part afin d'apporter les corrections nécessaires dans le dernier volume.

Henri BOUSQUET, 1995